concierge et licenciement économique

 

Peut-on supprimer un poste de concierge pour motif économique ?

Oui mais attention à bien motiver la procédure.

L’article L. 1233-3 du code du travail définit le licenciement pour motif économique comme celui qui est effectué « pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié, résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou des mutations technologiques ».
Pour qu’un licenciement soit qualifié d’économique, il doit être justifié par des difficultés économiques. Il n’est pas exigé que la situation soit catastrophique, mais les difficultés rencontrées doivent être réelles et sérieuses.

La lettre de licenciement devra mentionner à la fois les raisons économiques et leur incidence sur l’emploi ou le contrat de travail du salarié. Les motifs invoqués doivent être objectifs, précis et matériellement vérifiables. N’est donc pas valable la lettre faisant référence à des motifs économiques sans énoncer leur nature, ou même une baisse d’activité ou de chiffre d’affaires sans autre précision.

L’assemblée générale devra motiver les raisons du motif économique (copropriété en difficulté de paiement, impossibilité financière de prévoir des dépenses dans la loge…) cf jurisprudence en bas, points (1) à (4).

Concernant la majorité de vote en assemblée, si le règlement de copropriété prévoit l’existance d’un concierge ou si la destination de l’immeuble pourrait être altérée par sa suppression, c’est l’unanimité qui est recquise.
Sinon, à la double condition que le logement (si le concierge est logé) appartient bien au syndicat et que les modalités de jouissance des parties privatives de l’immeuble ne soit pas altérée, le vote à la majorité 26 des 2/3 est valable. (Cass. 3e civ. 28 juin 1995 n° 93-15.642 (5)   et  Cass. 3e civ., 24 sept. 2008 07-17039 (6)).

jurisprudences :

(1) La suppression du poste de gardien de l’immeuble avait été décidée par l’assemblée générale des copropriétaires dans le souci d’alléger les charges de la copropriété, en faisant assurer les tâches de nettoyage de l’immeuble par une employée de ménage 3 fois par semaine et en renonçant à entretenir la loge de la gardienne dont l’état de vétusté était inquiétant.
Le licenciement au vu des éléments ci-dessus exposés répond aux critères définis par l’article L. 1233-3 et revêt bien un caractère économique, ce qui donne au licenciement prononcé une cause réelle et sérieuse.
CA Paris du 25 mai 1992 (non publié)

(2)  La salariée ayant refusé la réduction de son temps de travail s’est faite licencier pour motifs économiques, après avoir constaté que le nombre d’heures de ménage figurant dans le contrat de travail de cette employée ne correspondait pas aux besoins de la copropriété. La cour d’appel de Paris a souligné que la modification du contrat avait pour unique finalité la réalisation d’une économie substantielle. Il ne s’agissait donc pas d’un motif économique au sens de l’article L. 1233-3 du code du travail, le syndicat des copropriétaires n’étant pas en proie à des difficultés économiques mais souhaitant simplement alléger le poids du poste « salaires et charges » dans sa trésorerie. Le licenciement était dès lors dénué de cause réelle et sérieuse.
CA Paris du 16 septembre 2003, n° 03-1311161 (non publié)

(3)  Le simple souci de maitriser les coûts financiers et de rationaliser le gardiennage de l’immeuble ne constitue pas un motif économique justifiant la suppression du poste.
CA de Paris du 31 Janvier 2013, n° 09/07035 (non publié)

(4)  La suppression du poste de gardienne avait été votée en assemblée, car la copropriété était contrainte d’effectuer des travaux très importants (remise en état des installations de désenfumage des cages d’escalier, pose de boîtes aux lettres, travaux de mise en conformité de l’ascenseur, ravalement, canalisation, éclairage, …). Le remplacement du poste de gardien par un service de nettoyage permettait de réaliser une économie des 2/3 des dépenses de gardiennage et donc de financer certains travaux en limitant les dépassements budgétaires que la copropriété subissait. Le motif économique a été considéré comme justifié.
CA d’Aix-en-Provence du 21 Février 2013, n° 12/01497 (non publié)

(5)

Cour de cassation
chambre civile 3 Audience publique du mercredi 28 juin 1995 N° de pourvoi: 93-15642
Non publié au bulletin Rejet

Président : M. BEAUVOIS, président

Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par le syndicat des copropriétaires des … (15ème), représenté par son syndic le cabinet Gérard Cardinal, administrateurs de biens, demeurant … (15ème), en cassation d’un arrêt rendu le 12 février 1993 par la cour d’appel de Paris (1ère chambre – section des urgences), au profit :

1 ) de Mme Odette Z… née Y…, demeurant … (12ème),

2 ) de Mme Nicole Y… née X…,

3 ) de M. Michel Y…, demeurant tous deux … (9ème), défendeurs à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l’audience publique du 23 mai 1995, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Chemin, conseiller rapporteur, MM. Douvreleur, Capoulade, Mlle Fossereau, MM. Fromont, Villien, conseillers, M. Chapron, conseiller référendaire, M. Sodini, avocat général, Mme Pacanowski, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. le conseiller Chemin, les observations de la SCP Gatineau, avocat du syndicat des copropriétaires des …, de la SCP Delaporte et Briard, avocat des consorts Y…, les conclusions de M. Sodini, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 12 février 1993), que l’assemblée générale des copropriétaires d’un immeuble ayant, à la majorité prévue par l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965, décidé de supprimer le service de gardiennage de cet immeuble, les consorts A…, copropriétaires opposants, ont assigné le syndicat des copropriétaires en annulation de cette décision ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires fait grief à l’arrêt d’accueillir cette demande, alors, selon le moyen, « 1 / que la décision de supprimer le poste de gardiennage dans un immeuble en copropriété peut être valablement prise à la majorité des deux tiers des voix de tous les copropriétaires dès lors qu’elle est sans incidence sur le standing de l’immeuble ;

que cette suppression est effective depuis de long mois et qu’elle ne gêne pas substantiellement la vie des copropriétaires compte tenu en particulier de la configuration des lieux, des attributions limitées qui étaient celles de la gardienne, notamment en ce qui concerne la distribution du courrier, de la mise en place de dispositifs de sécurité à chaque entrée de l’immeuble et du fait que le recours à une entreprise extérieure chargée de l’entretien des parties communes et de la sortie des poubelles a permis de remplacer, selon un moindre coût pour les copropriétaires, les prestations correspondantes dont la gardienne était chargée ;

qu’en exigeant, au contraire, l’unanimité des copropriétaires réunis en assemblée générale pour la suppression du poste de gardiennage, la cour d’appel a violé l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ;

2 / que, dans ses écritures d’appel, le syndicat des copropriétaires avait fait valoir qu’en raison principalement de la configuration des bâtiments et de la loge, les services rendus par la gardienne étaient inexistants ;

qu’en se fondant uniquement sur les dispositions du contrat de travail de la gardienne licenciée qui prévoyait une tâche de surveillance générale et de surveillance des ascenseurs et de la chaufferie ainsi que sur l’utilité que présentait l’existence d’un gardien pour les colis et autres plis spéciaux sans rechercher si, en dépit de la configuration particulière des lieux constitués de bâtiments entièrement distincts, la gardienne avait effectivement exécuté ces tâches avant qu’elle ne se trouve en situation de longue maladie, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 » ;

Mais attendu qu’ayant constaté, abstraction faite des autres tâches mentionnées au contrat de travail du dernier gardien, que, dans l’immeuble composé de trois bâtiments, l’installation de portes à interphones et de boîtes aux lettres ne procurait pas, en matière de surveillance générale de la circulation interne et de réception de colis et de plis spéciaux, des services équivalents à ceux effectivement rendus jusqu’alors par le gardien logé à demeure, la cour d’appel, qui a souverainement retenu qu’à défaut d’atteinte au « standing » de l’immeuble, la suppression du service de gardiennage apportait aux copropriétaires des modifications aux modalités de jouissance des parties privatives comprises dans leurs lots, a légalement justifié sa décision ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne le syndicat des copropriétaires des … aux dépens et aux frais d’exécution du présent arrêt ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par M. le président en son audience publique du vingt-huit juin mil neuf cent quatre-vingt-quinze.

(6)

cour de cassation chambre civile 3
Audience publique du mercredi 24 septembre 2008
N° de pourvoi: 07-17039

M. Cachelot (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président
Mme Renard-Payen, conseiller rapporteur
M. Cuinat, avocat général
SCP Masse-Dessen et Thouvenin, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

Texte intégral
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l’arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l’article 26 de la loi du 10 juillet 1965 ;

Attendu que l’assemblée générale ne peut, à quelque majorité que ce soit, imposer à un copropriétaire une modification à la destination de ses parties privatives ou aux modalités de leur jouissance, telles qu’elles résultent du règlement de copropriété ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué (Colmar, 15 février 2007), que M. X…, propriétaire d’un appartement dans un immeuble en copropriété a assigné le syndicat des copropriétaires de la résidence Marie-Antoinette en annulation des décisions n° 5 et 7 de l’assemblée générale du 27 mars 2002 ayant supprimé le poste de concierge et modifié en conséquence le règlement de copropriété ;

Attendu que pour accueillir la demande, l’arrêt retient qu’aux termes de l’article 11 du règlement de copropriété :  » le service de l’immeuble est assuré par un concierge si le syndicat en décide ainsi. A cet égard, il est rappelé que le lot n° 1 ci-dessus décrit dans l’état descriptif de division est prévu pour le logement du concierge…  » ; qu’il ressort de cette disposition du règlement de copropriété que celui-ci prévoit l’existence d’un concierge, même s’il ne l’impose pas, et que le syndicat des copropriétaires  » ayant ainsi décidé  » en engageant un concierge conformément aux prévisions du règlement, il ne pouvait voter sa suppression qu’à l’unanimité des copropriétaires, conformément à l’article 26, alinéa 2, de la loi du 10 juillet 1965 ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’elle avait relevé que le règlement de copropriété n’imposait pas l’existence d’un concierge, mais la laissait à la discrétion du syndicat des copropriétaires, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 15 février 2007, entre les parties, par la cour d’appel de Colmar ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Colmar, autrement composée ;

Condamne M. Roger X… aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X… ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé à l’audience publique du vingt-quatre septembre deux mille huit par M. Cachelot conseiller le plus ancien faisant fonction de président, conformément à l’article 452 du code de procédure civile.